3 questions à Rosalie Mann
Fondatrice et présidente de l'association No More Plastic Foundation

Fondatrice et présidente de l’association No More Plastic Foundation, elle met en garde sur les méfaits du plastique sur notre santé. Une matière encore bien trop présente dans l’univers de la mode et qui, pourtant, pourrait être remplacée par des matériaux alternatifs. Explications.
Pourquoi avoir créé No More Plastic et quelles sont les actions de cette association ?
J’ai créé No More Plastic en 2018 à la suite de problèmes de santé de mon fils. J’ai alors pris conscience de l’impact négatif de notre surconsommation sur notre santé, celle de nos enfants et des générations à venir. Ça a été un véritable électrochoc. Chaque année, le secteur textile produit un peu plus de 68 millions de tonnes de plastique et cela va crescendo. Malgré les idées reçues, recycler le plastique n’est pas une solution, car même recyclé le plastique reste toxique. Les citoyens ont très peu d’informations sur les méfaits du microplastique et du plastique recyclé, j’ai donc décidé de fonder l’association afin de démocratiser le sujet. Il y a des données scientifiques mais elles sont rarement communiquées au public. Nous nous sommes donc donnés pour objectif de les rendre accessibles et compréhensible car la compréhension est un prérequis à l’action. Nous mettons également en avant l’innovation. Il existe aujourd’hui beaucoup d’alternatives au plastique et aux matières synthétiques dans la mode. Malheureusement, elles sont conçues par de petites structures, des start-ups qui n’ont pas les moyens de les développer à grande échelle. Elles demeurent donc souvent à l’état de prototypes. Il est donc urgent d’investir pour valoriser ces matières, à l’image des matériaux bio végétaux, et de créer de véritables filières de production capables de fournir les grands groupes. Enfin, il faut convaincre les pouvoirs publics de développer des campagnes de santé publique d’ampleur autour des dangers du plastique. Dans les médias, et de façon générale, on lie la pollution plastique aux problèmes environnementaux uniquement. Or, la pollution plastique est devenue une question de santé publique car elle est responsable de nombreuses maladies telles que le cancer du sein, du colon, l’endométriose, la maladie de Crohn ou encore l’infertilité.
Quels sont vos conseils pour aider les citoyens à consommer moins de vêtements contenant du plastique ?
Lire attentivement les étiquettes et opter pour des matières naturelles. Mais, en réalité, l’offre alternative au plastique n’est pas suffisante aujourd’hui. Le consommateur subit cette pollution invisible en ingérant chaque semaine l’équivalent d’une carte de crédit en microplastiques. Au 1er janvier 2024, un Eco-score devrait figurer sur les produits alimentaires et textiles. Nous interpellons le gouvernement et les industriels sur la nécessité que dans la méthode de calcul de cet Eco-score soit inclus la pollution microplastique. On sait aujourd’hui que lorsque les vêtements sont lavés les matières synthétiques libèrent des microparticules ou nanoparticules que l’on retrouve ensuite dans les océans. Mais c’est aussi le cas durant l’usage d’un vêtement ou d’un accessoire. La libération directe de microfibres des vêtements dans l’air en raison de l’usure est d’égale importance que pour les rejets dans l’eau. On ne peut ignorer cette pollution invisible. Sans compter que toutes les matières plastiques contiennent des composants considérés comme des perturbateurs endocriniens qui empoisonnent notre organisme par les pores de la peau. On imagine ainsi aisément les effets de textiles synthétiques en contact direct avec la peau, notamment la lingerie. D’où l’urgence de développer des lingeries en matières naturelles ou des innovations qui, j’insiste existent déjà.
Quelles sont les collaborations que No More Plastic développe avec des marques de mode ?
L’année dernière, nous avons créé avec la marque Yatay des baskets colorées et sans plastique. Nous avons voulu montrer à travers un accessoire de mode aujourd’hui incontournable, qu’il était possible de faire autrement et sans matière synthétique. Nous avons également travaillé sur des t-shirts à base d’algues avec Côme Editions pour limiter la consommation de coton. Même si ces productions sont limitées, elles sont essentielles. Elles sont une vitrine, une façon de prendre la parole, de mettre en avant les alternatives innovantes.